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Bilan et diagnostic...

Cinq siècles de progrès ?

par Paul Soriano

1er juillet 2021, modifié le 7 septembre 2024

Le discours de Darwin appelle un bilan de l’ « aventure humaine », dont l’homme occidental, qui s’est octroyé le premier rôle (discours de Hegel) a du reste fixé les critères d’évaluation.

Si l’on convient que l’Occident s’est emparé du monde depuis les « Grandes découvertes », quel bilan donc, après cinq siècles de « progrès », trois siècles d’ « émancipation » depuis les Lumières, tendus vers un monde meilleur – a better world to live in comme le ressassent encore ad nauseam nos amis américains dans leurs séries, sur Netflix et ailleurs ?

Les progrès de la science, de la technique et de l’industrie nourrissent l’actif et le passif… L’actif est spectaculaire : espérance de vie en bonne santé, niveau de vie et commodités de toutes sortes, en dépit des inégalités qui persistent…

Comparées à la vague de fond de la révolution industrielle, les révolutions française, américaine et russe n’agitent que la surface… Une idéologie (celle des Lumières) qui ignore le corps physique ou ethnique a plus fait que toute autre pour les corps… Si bien qu’il faut désormais affronter l’épuisement des ressources naturelles, et une critique « écologiste », tout aussi occidentale…

Avant de se rallier, sur le tard, à la « démocratie libérale » l’Occident a expérimenté (et exporté) les pires régimes politiques, obsédé par le projet de changer le monde, voire d’engendrer (ou de fabriquer) un « homme nouveau » : un projet à vrai dire plus religieux que politique, et d’autant plus redoutable qu’il occulte en général cette religiosité, se croyant affranchi de toute croyance et préjugé.

Pour ce qui est de rendre le monde meilleur, il y a manifestement un bug dans le logiciel occidental : le génocide des Indiens (entre autres) et l’esclavage, deux guerres mondiales, la Shoah, le goulag, Hiroshima… Sans compter la destruction de l’anthropo-diversité puis, carrément, de la biodiversité, dont le massacre des abeilles (l’insecte pollinisateur !), bref, le saccage de la planète…

En nombre de victimes, individus, peuples, cultures, espèces (pourquoi serait-ce mal de détruire la biodiversité et bien de réduire l’anthropodiversité des cultures ?), le bilan est accablant, sans compter ces existences désespérantes qui gâchent un peu l’espérance de vie.

Nos écologistes radicaux et autres éveillés décoloniaux sont sans doute un peu bizarres, mais il faut reconnaître qu’on leur a donné du grain à moudre… Les Occidentaux (les « Blancs ») ne sont peut-être pas plus mauvais que les autres, mais ils se sont donné les moyens de l’être à grande échelle, et tout aussi fanatiquement que les vieux croyants les plus endurcis.

Et il y en a un autre (de bug) dans le logiciel du « progrès ».

Mais pourquoi cette planète dévastée ressemble-t-elle si souvent à une Nef des fous peuplée de zombies vindicatifs ? On connaît les diagnostics : pas assez d’émancipation (lorsque l’état du malade empire on ne change pas de médecine, on prescrit double dose) ; le passé qui ne passe pas, les « retours du refoulé » névrotiques, à commencer par les fièvres identitaires virulentes ; et cette Nature enfin, dont le prétendu maître et possesseur imprévoyant à épuisé les ressources…

Et si le principal responsable et coupable n’était rien d’autre que l’humain lui-même, le seul être dont « on » ne s’est pas encore émancipé ? Si bien (ou si mal) qu’on envisage sérieusement un avenir « post-humain », aux bons soins d’une créature encore plus intelligente sinon « meilleure » que son créateur, toujours insatisfait, ce mécontent structurel gagné par la lassitude, aurait bouclé son parcours…


Dans Médium 34 (« Occident, fiche clinique »), Régis Debray a recensé les atouts et les handicaps de l’Occident au début du XXIe siècle… On est aujourd’hui à l’heure du bilan.

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