A la question « Qu’est-ce que les Lumières », Kant répond : la sortie de l’homme de sa minorité , son accès à l’âge adulte.
Cette formule est d’une rare densité : elle rend compte de tous les « ismes » qui caractérisent en effet les Lumières : universalisme et individualisme (« l’homme »), progressisme et rationalisme (de l’adulte, par différence avec l’enfant qui n’a pas atteint « l’âge de raison ») : Kant introduit en douce des « âges » de l’humanité (sans distinction) et les confond avec les âges de l’individu : la métaphore (ou la métonymie) est pour le moins sommaire… Mais intéressante : L’Adulte, c’est le décideur rationnel« émancipé » de ce qui restait en lui d’archaïque (le Parent autoritaire ou protecteur) ou d’immature (l’Enfant, soumis, rebelle, capricieux, créatif…) [1]… car ce n’est pas l’adulte (en nous) qui s’indigne, s’émeut ou se révolte…
Ce qui est amusant, c’est que nos « hommes des Lumières », les Diderot, d’Alembert, Rousseau et autres… s’expriment et se comportent volontiers comme des garnements (ou des adolescents) plutôt que comme des adultes (à la différence de Kant [2], adulte impeccable, mais c’est bien son problème et sa limite [3])… Seule la fonction parentale leur semble étrangère, ce qui en dit long sur le sens de leur révolte ; Rousseau veut bien, à la rigueur, faire instituteur, mais son pauvre Émile est décidément orphelin.
Les peuples historiques sont-ils des parents abusifs ou des enfants puérils ? Le retour des identités une forme de gâtisme, ou une retombée en enfance ?
La suite de l’histoire nous suggère que le destin de l’adulte rationnel, puis calculateur (computeur), c’est de céder la place à l’intelligence artificielle, l’adulte à l’état pur et parfait. Le devenir-algorithme de l’intellectuel