Votre identité, qui vous êtes, ce que vous faites et consommez, les gens et les lieux que vous fréquentez, et les moments où vous le faites… mais aussi ce que vous êtes susceptible de faire, tout cela votre smartphone le sait et le fait savoir, afin de satisfaire vos désirs et même de les anticiper. Il en sait plus que vous sur vous-même, tel le Dieu de saint Augustin, « plus intime à moi-même que moi-même »… La carte (l’ensemble de vos traces) est plus que le territoire, ce que vous croyez être, « en réalité ». Votre identité ou ce qu’il en restera quand vous serez émancipé des talents et qualités rendus superflus par les bullshit jobs du futur.
Les critiques de l’ « autocratie numérique » (Shoshana Zuboff) reprochent à juste titre aux GAFA de s’approprier les données personnelles de leurs usagers pour en faire commerce, mais en matière de « propriété des données personnelles », la propriété est secondaire, l’essentiel, le pire, ce sont les données, la dataïsation intégrale du sujet.
Les GAFA ayant annexé Hollywood (le produit de cette annexion s’appelle, entre autre, Netflix), le soft-power audiovisuel greffé sur les réseaux numériques éduque et rééduque sans relâche les hommachines quelconques ; le socialement correct est diffusé 24/24 et 7/7 par tous les canaux (information, fictions, divertissement, publicité…) opérés par les maîtres et possesseurs.
Et sinon, d’autres algorithmes repèrent, sur les mêmes réseaux sociaux, propos déplacés et discours de haine, et sanctionnent leurs auteurs, du simple quidam au chef de l’Etat. En cas « d’infractions répétées aux Standards de la communauté » (sic, Facebook), votre Page sera « dépubliée »… Ce faisant, les dirigeants des plateformes ne font peut-être que se plier à l’esprit du temps, qui est à la censure : c’était bien la peine de nous arracher à la sainte Inquisition pour la retrouver « ubérisée » par la disgrâce de réseaux livrés à des millions de petits Inquisiteurs.